mercredi 9 décembre 2020

L'assassinat des sœurs Mirabal : symbole caribéen de la violence faite aux femmes

Depuis 1999, seuls deux pays sur trois ont interdit la violence domestique, tandis que 37 pays dans le monde continuent d’exempter les auteurs de viol s’ils sont mariés ou épousent éventuellement la victime. 49 pays n’ont actuellement aucune loi protégeant les femmes de la violence domestique. Il est moins connu que le 25 novembre, journée internationale contre les violences faites aux femmes, célèbre la mémoire des sœurs Mirabal, militantes féministes et démocrates assassinées par le dictateur dominicain Rafael Trujillo.


Origine du mouvement féministe en République Dominicaine

L’origine du mouvement féministe organisé en République Dominicaine souligne les interactions entre les questions de genre, de race et de classes. Il s’origine dans les contacts entre des femmes de la classe moyenne éduquée dominicaines et états-uniennes durant la première occupation de la République Dominicaine par les États-Unis entre 1916 et 1924. Ce sont ces interactions que Clara Palmiste explore à l’occasion du 46e colloque annuel de l’Association des historiens de la Caraïbe (2014) (Palmiste, 2014) en soulignant notamment le lien entre luttes féministes et luttes d’indépendance nationale.

Trujillo et les sœurs Mirabal

L’histoire des sœurs Mirabal illustre cette intrication. Les sœurs Mirabal – Patria (née en 1924), Minerva (née en 1926) et Maria Teresa (née en 1935), ainsi que Belgica Adela, dite Dede, qui ne participa pas directement à leur aventure – sont issues de la classe moyenne et reçoivent une bonne éducation dans la République Dominicaine dirigée par le dictateur Rafael Trujillo de 1930 à 1961.

Ce dernier, en plus d’être un dictateur particulièrement sanguinaire et mégalomane, au point de rebaptiser Ciudad Trujillo la capitale, était un prédateur sexuel à la réputation si établie que les familles dominicaines essayaient de cacher leurs filles à ses yeux quand il se déplaçait dans le pays.

Ayant remarqué les filles Mirabal et particulièrement Minerva, de l’avis général la plus belle et la plus charismatique, il invite la famille à une réception en 1949. Cette dernière ne peut refuser ; mais, alors que Trujillo danse avec Minerva, elle le gifle devant toute l’assemblée. Il est presque étonnant que la famille puisse alors rentrer chez elle vivante. Peu de temps après, le père Mirabal fut jeté en prison et torturé. Minerva dut venir s’excuser devant Trujillo pour obtenir la libération de son père. Elle obtint aussi de pouvoir s’inscrire à la Faculté de Droit de Santo Domingo, ce qui était alors interdit aux femmes.

Par vengeance, Trujillo refusa qu’elle puisse passer en deuxième année avant qu’elle ne prononce un discours public de louange à son égard et en 1957, alors qu’elle avait été reçue avec les honneurs, il interdit qu’elle puisse exercer la profession d’avocat.

Le Mouvement révolutionnaire du 14 juin

Pendant ses études, Minerva rencontre Manolo Tavárez Justo, militant anti-impérialiste et anti-trujilliste qu’elle épouse en 1955. Le couple mène une active campagne pour libérer son pays de Trujillo sans s’aligner sur les États-Unis, rejoint par de nombreux militants, dont deux sœurs de Minerva, Patria et Maria Teresa, qui rejoignent la lutte avec leurs époux.

Suite à la victoire de la Révolution cubaine le 1er janvier 1959, des militants du Mouvement de Libération dominicain soutenu par le nouveau régime cubain débarquent le 14 juin 1959 dans le nord de la République Dominicaine, mais ils sont rapidement défaits par les troupes trujillistes.

Cet échec pousse les militants démocrates de l’intérieur à se rassembler dans un mouvement unique, le Movimiento Revolucionario 14 de Junio (1J4) dont Manolo Tavárez et Minerva Mirabal sont les deux figures emblématiques. Le 1J4 programme un attentat contre Trujillo à l’occasion d’une fête agricole, mais le jour avant l’action prévue, le 21 janvier 1960, le SIM, le service de renseignement trujilliste, opère une grande rafle parmi les militants du 1J4, emprisonnant de nombreux militants dont les trois sœurs Mirabal et leurs maris.

Les emprisonnements et les tortures contre des militants anti-trujillistes, pour beaucoup issus de familles aisées proches du régime, provoquent un électrochoc dans la société dominicaine qui s’éloigne de plus en plus de Trujillo. La lettre pastorale de janvier 1960 des évêques dominicains, qui signe la rupture entre Trujillo et l’Église catholique, et les tentatives de Trujillo d’assassiner le président vénézuélien Romulo Betancourt, poussent de nombreux pays de l’hémisphère américain à commencer par les États-Unis présidés par John F. Kennedy, à ne plus soutenir le régime trujilliste. Suite aux sanctions internationales, Trujillo est obligé de libérer de nombreuses militantes du Mouvement du 14 juin, mais garde les hommes en prison.

L’assassinat

La Fotaleza San Felipe de Puerta Plata 

Le 25 novembre 1960, les trois sœurs Mirabal sont autorisées à rendre visite à leurs maris emprisonnés dans la Fortaleza San Felipe de Puerta Plata au nord de la République Dominicaine. Sur le chemin du retour des agents trujillistes les arrêtent sur une route isolée de la Cordillère centrale. Les trois sœurs et leur chauffeur sont battus à mort et leurs assassins tentent de maquiller le crime en accident de voiture. La nouvelle déclenche une vague d’indignation dans toute la République Dominicaine.

Six mois plus tard, le 30 mai 1961, un groupe d’officiers assassine Trujillo avec le soutien implicite des États-Unis. Cette mort ouvre une période troublée où la brève période démocratique sous la présidence de Juan Bosch est brutalement interrompue par un putsch de militaires anti-communistes puis une guerre civile qui se conclut avec la deuxième occupation de la République Dominicaine par les États-Unis entre 1965 et 1966 et le retour de Joaquín Balaguer, Président en titre de la République Dominicaine au moment de l’assassinat de Trujillo.

Postérité des sœurs Mirabal

En juillet 1981, la première rencontre féministe d’Amérique latine et de la Caraïbe à Bogotá proclame le 25 novembre « Journée internationale de non-violence envers les femmes », étendant ainsi leur renommée à toute l’Amérique latine.

En 1994, l’écrivaine Julia Alvarez publie en anglais, In the Time of the Butterflies (Algonquin Books), un roman historique narrant l’histoire des « Sœurs papillons » en reprenant le point de vue de Minerva Mirabal. Ce roman d’une des auteures américaines d’origine dominicaine les plus renommées fit connaître cette histoire aux États-Unis. Cette même année, la maison natale des trois sœurs est convertie en musée sous l’égide de la Fondacion Hermanas Mirabal dirigée par Dédé Mirabal, la dernière survivante.

Le 8 mars 1997, à l’occasion de la première Journée internationale des femmes suivant le départ définitif de Balaguer du pouvoir, l’un des deux obélisques ornant le Malecon de Santo Domingo est repeint avec le portrait des trois sœurs. Cet obélisque avait été érigé à l’origine par Trujillo pour célébrer la fin de la tutelle des États-Unis sur les douanes de la République Dominicaine et le retour à la pleine souveraineté.

En 1999, l’Assemblée générale de l’ONU proclame le 25 novembre « Journée internationale contre les violences de genre ».

Le 25 novembre 2000 les restes des trois sœurs sont transférés dans le jardin de la Maison-Musée des Sœurs Mirabal qui devient officiellement une annexe du Panthéon de la Patrie dominicain et un monument en leur honneur est érigé.

En 2007, leur province de naissance, Salcedo, est rebaptisée Provincia de Hermanas Mirabal.

En 2001, le réalisateur espagnol, Mariano Barroso, réalise un téléfilm reprenant le roman de Julia Alvarez dans lequel Salma Hayek joue le rôle de Minerva et en 2010, le film Trópico de Sangre, dirigé le réalisateur dominicain Juan Delancer, reprend l’histoire des sœurs Mirabal en s’appuyant sur le témoignage de Dédé Mirabal.


Pour aller plus loin

Conférence sur Manioc

Palmiste, Clara, L'élaboration d'une pensée féministe sous domination : le cas de la République dominicaine dans les années 1920, 2014 : http://www.manioc.org/fichiers/V15007

Ouvrages

Alvarez, Julia. In the Time of the Butterflies. Algonquin Books, 1994. (trad. : Au temps des papillons. Métailié, 2003.)

Manley, Elizabeth S. The Paradox of Paternalism : Women and the Politics of Authoritarianism in the Dominican Republic. University Press of Florida, 2017.

Maier, Elizabeth, et Nathalie Lebon. Women’s Activism in Latin America and the Caribbean : Engendering Social Justice, Democratizing Citizenship. Rutgers University Press, 2010.

Vargas Llosa, Mario. La fiesta del Chivo. Alfaguara, 2000. (trad. : La Fête au Bouc. Gallimard, 2000)

Articles

Puleo, Gus. « Remembering and Reconstruction the Mirabal Sisters in Julia Álvarez’s “In the Time of the Butterflies” ». Bilingual Review / La Revista Bilingüe, vol. 23, no 1, Bilingual Press / Editorial Bilingüe, 1998, p. 11‑20.

Robinson, Nancy P. « Origins of the International Day for the Elimination of Violence against Women: The Caribbean Contribution ». Caribbean Studies, vol. 34, no 2, Institute of Caribbean Studies, UPR, Rio Piedras Campus, 2006, p. 141‑61.

Hall, Michael R. « The Transition from Dictatorship to Democracy in the Dominican Republic ». Journal of Third World Studies, vol. 23, no 1, University Press of Florida, 2006, p. 13‑16.

Films

Barroso, Mariano. In the Time of the Butterflies. Metro-Goldwyn-Mayer (MGM), Showtime Networks, Ventanarosa Productions, 2004.

Delancer, Juan. Tropico de Sangre. Kemasi Films, 2010.

Voir aussi :

Site officiel de la maison natale des trois sœurs convertie en musée, la Casa Museo Hermanas Mirabal : http://casamuseohermanasmirabal.com


FV



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jeudi 3 décembre 2020

Diego Maradona : « main de Dieu » et pied gauche

 

Après Carlos Gardel, Juan et Eva Péron, Diego Armando Maradona est entré au Panthéon argentin. L’Argentine est triste, le président Alberto Fernández a déclaré trois jours de deuil national pour honorer la disparition de celui qui fut de son vivant une icône du football contemporain, mais aussi une figure symbolique de l’histoire de l’Amérique latine.
 

Du bidonville aux arènes européennes du football

Comme de nombreux latino-américains vénérant le football, Diego Maradona a commencé très tôt la pratique de ce sport. El Pibe de Oro  (« le gamin en or ») est né  à Lanús dans la province de Buenos Aires et a grandi dans le bidonville de Villa Fiorito dans la banlieue sud de la capitale argentine. Son talent lui ouvre les portes du prestigieux club de Boca Juniors puis le mène jusqu’en Europe où il débute une carrière internationale en intégrant l'équipe du FC Barcelone en 1982 puis celle de la Società Sportiva Calcio Napoli en 1984. Son « dribbling game » basé sur l’exploit individuel (inspiré des premiers clubs aristocratiques britanniques) fait merveille.  

 

 

 

Reconnaissance internationale et spectacle médiatique

Le numéro dix napolitain remporte en effet de nombreux titres, mais sa victoire la plus retentissante est celle du capitaine de l’équipe nationale d’Argentine lors de la coupe du monde de 1986. Lors de cette compétition internationale, il inscrit, à l’insu des arbitres, le premier but de la rencontre à l’aide de la main qu’il qualifie de « main de Dieu » à l’issue du match. 

Lors de sa carrière internationale et malgré ses succès, Diego Maradona développe une forte dépendance à la cocaïne dont il tente de se libérer en suivant une cure de désintoxication à Cuba en 2000. Peut-être faut-il voir dans cette lente déchéance physique le résultat d’une pratique sportive devenue un rouage mondial de l’industrie du divertissement. Le football professionnel semble avoir pris toutes les apparences et les usages du show business et suivi les dérives d’un « star system » qui, en avilissant les individus, nourrit le spectacle médiatique.

 

 

 

 

Diego Maradona : une figure latino-américaine

Pourtant, durant ces deux dernières décennies, Diego Maradona semble avoir tourné le dos à ces années de turpitudes en affichant ostensiblement sa sympathie à l’égard de Fidel Castro, du président vénézuélien Hugo Chavez ou encore d’Evo Morales. Par sincérité, par provocation (on ne compte plus les critiques, parfois officielles, que lui ont valu ses amitiés politiques), il a peut-être souhaité exprimer ainsi la douleur d’une génération marquée par les années de dictature nées du « Plan Condor ». Dans cette dernière tranche de vie, il a peut-être également pris la mesure de ce qu’Albert Camus, gardien du Racing universitaire d’Alger, nous a dit de sa pratique du football : « Tout ce que je sais de la morale, c'est au football que je le dois. »

Manioc s’est fait l’écho des enjeux géopolitiques, économiques et historiques autour du football.

Bon visionnage et bonne lecture !

 CB

 

Conférences

 

 

Wladimir Andreff, Les grands évènements sportifs, atouts majeurs de valorisation : coupe du monde de football 2014 et JO 2016 facteur de développement de la Guyane. Analyse du coût des méga-évènements sportifs. Analyse du dépassement du coût des JO

 http://www.manioc.org/fichiers/V15322

 http://www.manioc.org/fichiers/V15325

 Illustrations

Lacauderie, France pittoresque ou description pittoresque, topographique et statistique des départements et colonie de la France... 
 
 
 

 Bibliographie

Eduardo Galeano, El fútbol a sol y sombra, Madrid ; México : Siglo veintiuno, 2003
 
Roberto Da Matta, A bola corre mais que os homens : duas copas, treze crônicas e três ensaios sobre futebol , Rio de Janeiro : Rocco, 2006
 
Jean-Claude Michea, Le plus beau but était une passe : écrits sur le football, Paris : Climats, 2014

 



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samedi 28 novembre 2020

De la Monarchie Constitutionnelle à la République : mise en place d’une nouvelle forme de gouvernement à la Barbade

Une séparation de la Couronne britannique

Longtemps colonisée par l’Angleterre, l’île de la Barbade fait partie des Etats souverains ayant choisi de maintenir des relations de proximité particulières avec le Royaume-Uni par le biais du Commonwealth. En effet, des 53 pays formant cette organisation, la Barbade compte parmi les 16 Monarchies dont le monarque est la reine Elisabeth II. Toutefois, aujourd’hui cette forme de gouvernement est remise en question par les Barbadiens eux-mêmes.


La colonisation britannique en héritage 

Située dans la mer des Caraïbes non loin de Sainte-Lucie, la Barbade est une île orientale des Petites Antilles d’une superficie de 430 km² qui comporte 287 000 habitants. Les premiers peuples autochtones de ce territoire caribéen ont d’abord été les Arawaks qui ont par la suite été envahis par les Kalinagos (anciennement les Caraïbes), ce qui a conduit au décroissement des premiers. En 1536, les Portugais faisant route vers le Brésil sont les premiers européens à s’y rendre. Le navigateur Pedro A. Campos baptise l’île « Os Barbados » – les barbus – en hommage aux figuiers présents sur l'île et dont le feuillage rappelle une barbe. En 1625, les Anglais débarquent à leur tour. L’île étant quasiment inhabitée, ils en prennent possession au nom du roi et établissent à Holetown la première colonie anglaise. Des terrains sont attribués à de riches Anglais pour en faire des plantations. À ce titre, le tabac et le coton sont les premiers types de culture. Mais en 1630, la canne à sucre est introduite à la Barbade. Cette dernière exige un gros investissement et une main d’œuvre importante, ce qui conduit à la transportation d’esclaves africains pour exploiter les plantations. Après environ deux siècles d’exploitation des noirs d’Afrique, l’esclavage est aboli en 1834 à la Barbade. Le pays est resté une colonie britannique jusqu’en 1966 et est devenu officiellement un membre indépendant du Commonwealth le 30 novembre 1966. 


Le règne d'un monarque essentiellement symbolique mais pesant 

En accédant à leur indépendance, les barbadiens ont choisi d’adopter la Monarchie comme forme de gouvernement. À ce titre, même si ce territoire insulaire est bel et bien gouverné par un Premier ministre ayant la nationalité barbadienne, le Chef de l’Etat demeure le souverain du Royaume-Uni – et ce même s’il exerce une autorité symbolique. En effet, l’article 63 de la Constitution barbadienne de 1966 confère l’autorité du pouvoir exécutif à Sa Majesté la reine Elisabeth II représentée par un Gouverneur Général. En réalité, celle-ci est la titulaire nominale de ce pouvoir car la Constitution précise que le Cabinet ministériel dirigé par le Premier ministre est le principal instrument de la politique du pays : il est chargé de la direction générale et du contrôle du gouvernement de la Barbade. En d’autres termes, la reine règne mais ne gouverne pas. Ses attributions relèvent d’une compétence purement juridique. Son représentant ne peut en aucun cas exercer des pouvoirs politiques.

Néanmoins, cette compétence juridique dont le souverain est attributaire, a une valeur considérable dans la vie nationale. En effet, le Gouverneur Général, - son représentant - est entre autres chargé de la nomination du Premier ministre, des membres du cabinet ministériel et de certains fonctionnaires. C’est en ce sens que de nombreux employés de la Couronne sont tenus par la loi de réciter un serment d'allégeance à la monarque avant de prendre leurs fonctions. Par exemple, le serment exigé par le directeur des poursuites pénales est le suivant : « Je, [nom], jure que je servirai bel et bien Sa Majesté la reine Elizabeth II, ses héritiers et successeurs, au bureau du directeur des poursuites pénales. Alors que Dieu me vienne en aide ». Par ailleurs, le Gouverneur assure la conduite des élections législatives et peut les convoquer de manière anticipée en cas de dissolution du Parlement par lui-même.

Fort de toutes ces prérogatives constitutionnelles accordées à la reine, on pourrait déduire que même en accédant à l’indépendance, le peuple barbadien a fait preuve de loyauté envers la Couronne britannique. Toutefois, à l’instar de la plupart des Etats faisant partie du Commonwealth, la Barbade semble aspirer à devenir une République.

 

Vers l’établissement d’une République de Barbade

Le projet de transformer l’île en une République avait souvent été évoqué mais n’avait jamais pu aboutir. La question a été soulevée pour la première fois, à la fin des années 70. En 1979, une commission d'enquête a été constituée et chargée d'étudier la faisabilité de l'introduction d'un système républicain. Celle-ci est parvenue à la conclusion que les Barbadiens préféraient maintenir la monarchie constitutionnelle. Il faut noter que pour modifier la Constitution de la Barbade, il faut une majorité des deux tiers des sièges au sein du Parlement.

Après l’échec d’autres tentatives gouvernementales dans les années 1990 et 2000, Mia Mottley, actuelle Première ministre de la Barbade et son parti, le DLP, Parti Travailliste Démocratique, ont pu conquérir ces sièges aux élections de 2018. Bénéficiant d’une majorité parlementaire, le gouvernement barbadien est donc désormais en mesure de changer la Constitution pour que la Barbade devienne une République. Le 15 septembre 2020, dans son discours du Trône marquant l'ouverture du Parlement, Sandra Mason, gouverneur général, a déclaré : « Il est temps de laisser notre passé colonial derrière nous. Les barbadiens veulent d'un chef d’état issu du pays ». À cet effet, Madame Mottley et son gouvernement prévoient de rendre effectif le passage à la République en novembre 2021 pour le 55ème anniversaire de l’indépendance de la Barbade.

Le 30 novembre 2021, le peuple barbadien devrait donc avoir un président de la République en lieu et place d’un monarque. Cette grande preuve de souveraineté de la Barbade la poussera-t-elle également à l’avenir à se retirer du Commonwealth ? Seul l’avenir nous le dira.


Sources bibliographiques :   

Voyage au pays du cacao et du sucre de canne, Th. Dufau. Paris : Hachette, 1906. Provenance : Archives départementales de Guadeloupe. Disponible en ligne sur Manioc : http://www.manioc.org/patrimon/ADG18152

Souvenirs de Voyage aux Antilles et Guyanes, André Questel (1869-1931). Paris, Imprimerie Pradier, 1919. Provenance : Archives départementales de Guadeloupe. Disponible en ligne sur Manioc : http://www.manioc.org/patrimon/ADG18191 

Nouveau voyage aux isles de l'Amérique, contenant l'histoire naturelle de ces pays, Jean-Baptiste Labat (1663-1738). Paris, Chez Guillaume Cavelier père, 1742. Provenance : Archives départementales de Guadeloupe. Disponible en ligne sur Manioc : http://www.manioc.org/patrimon/ADG1703 

Présentation de la Barbade [en ligne]. France Diplomatie [consulté le 23 novembre 2020]. https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/barbade/presentation-de-la-barbade/

La Barbade dit « goodbye » à Elizabeth II et va devenir une république [en ligne]. Le Point [consulté le 25 novembre 2020]. https://www.lepoint.fr/monde/la-barbade-dit-goodbye-a-elizabeth-ii-et-va-devenir-une-republique-16-09-2020-2392295_24.php

La Reine Elizabeth bientôt détrônée comme chef d'Etat de Barbade [en ligne]. Franceinfo [consulté le 26 novembre 2020]. https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/la-reine-elizabeth-bientot-detronee-comme-chef-d-etat-de-barbade-871798.html

 

Illustrations : 

Carte de la Barbade. Extrait de : Les Petites Antilles : étude sur leur évolution économique. Disponible en ligne sur Manioc : http://www.manioc.org/images/PAP110990069i1


SC


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mardi 24 novembre 2020

Les féminismes postcoloniaux à l'honneur : le séminaire FEMPOCO

Lancé en 2018, FEMPOCO est un séminaire de recherche pluridisciplinaire qui vise à étudier et faire connaître les textes fondamentaux des féminismes postcoloniaux et des productions culturelles et artistiques emblématiques de ces mouvements. Ce séminaire prévoit entre 5 à 8 séances de travail par an et se déroule sur le campus de la jeune et nouvelle Université de Guyane.

 


 

Ce séminaire organisé dans le cadre du laboratoire MINEA a pour vocation d’être un lieu de rencontre et d’échanges permettant sur le long terme une recherche approfondie en Guyane sur les pensées du féminisme. Le féminisme est un sujet d’actualité brûlant puisque partout, les droits des femmes continuent d’être bafoués, et que face à cette menace et aux violences commises, les femmes décident de lutter. Nous assistons ainsi à un renouveau du féminisme, et les débats sur ce sujet se multiplient, y compris en Guyane. 

Notre intérêt pour les féminismes postcoloniaux vient de ce que ces féminismes intègrent une critique des luttes féministes qui ont eu pour effet d’exclure des hommes et des femmes, sur la base de la race ou de la classe. En effet, le féminisme occidental a parfois produit ou reproduit des discriminations visant les minorités et les groupes économiquement défavorisés. Les féminismes postcoloniaux interrogent le genre, le passé colonial et les rapports de force économiques. Ils tendent à renverser la relation centre-périphérie en réinstaurant « les marges » comme centre et en « provincialisant l’Europe » selon l’expression fameuse de l’historien Dipesh Chakrabarty. 

 

Tina Harpin, Ahmed Mulla (Université de Guyane, séminaire FEMPOCO)

 

Pour en savoir plus sur le travail du séminaire FEMPOCO, vous pouvez visionner les conférences suivantes : 

Les références complètes sont disponibles en cliquant sur le lien de chaque vidéo

 

http://www.manioc.org/fichiers/V20141

http://www.manioc.org/fichiers/V20140

http://www.manioc.org/fichiers/V20142


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mardi 20 octobre 2020

Les enjeux de l’interculturalité et de la pluriethnicité dans la relation d’aide et de soin en Guyane

La pluralité des identités culturelles et l'accompagnement des publics


 Quelles sont les difficultés, les résistances, les outils innovants et les solutions de remédiation, pour une prise en charge des publics satisfaisante, soucieuse du respect de l'altérité ? Cette question était au centre du colloque organisé par L’Université de Guyane*, du 9 au 13 décembre 2019, à Cayenne et à Saint-Laurent-du-Maroni : « les enjeux de l’interculturalité et de la pluriethnicité dans la relation d’aide et de soin en Guyane ».  Acteurs et actrices du travail social, de l'éducation et du soin se sont associés aux universitaires et aux publics pour partager leurs expériences, perspectives et pistes. Le blog Manioc vous invite à découvrir les enjeux du colloque
présentés par Erika Béranger, puis à visionner les interventions filmées.

Ouverture du colloque, Christian Cécile
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
     Confrontés à la diversité des publics accompagnés, les professionnels de l’éducation, du soin et du travail social, sont conduits, qu’ils le veuillent ou non, qu’ils en aient conscience ou pas, « à faire avec ». En effet, aucun patient, aucun usager du travail social ne laisse son identité propre à la porte de l’institution chargée de son accompagnement. 
 

 L'altérité mise en question

 

    De l’autre côté, les professionnels, eux non plus, ne peuvent pas faire fi de l’altérité (culturelle, linguistique, identitaire…) des personnes qu’ils accompagnent. La différence qu’ils observent chez l’autre éveille la question de leur propre altérité, de leur propre identité et interroge leurs propres modèles culturels, tant professionnels que familiaux. Dès lors, les professionnels ont eu l’occasion durant ce colloque d’explorer cette réflexion à travers trois champs d’intervention mettant en jeu la pluriethnicité et la pluriculturalité en Guyane : le travail social, le domaine médicosocial et la formation des professionnels de la relation d’aide et de soins. 

    Différentes modalités d’intervention (plénières, symposiums et ateliers) ont été proposées afin de permettre aux professionnels et aux intervenants d’échanger sur les enjeux de l’interculturalité et de la pluriethnicité dans la relation d’aide et de soin en contexte guyanais.

Erika BERANGER
Doctorante, Chargée de projets et de développement à l'IRDTS

*Colloque organisé par le laboratoire Migrations, Interculturalité et Education en Amazonie (MINEA)

Visionner les interventions

Les références complètes sont disponibles en cliquant sur le lien de chaque vidéo.

9 décembre 2019, Cayenne

10 décembre 2019, Cayenne

12 décembre, Saint-Laurent du Maroni

Symposium : éducation et formation à l'épreuve de la différence

13 décembre 2019, Saint-Laurent du Maroni

Manioc : CB, AP


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