lundi 27 novembre 2017

Focus Manioc : le botaniste Antoine Duss

"Le père aux herbes"

Source Manioc

Manioc vous propose un petit focus sur un botaniste suisse qui a longtemps vécut aux Antilles Antoine Duss (1840-1924). 


Antoine Duss fait sa rhétorique à Fribourg puis son scolasticat à Paris avec le souhait de rejoindre les missions en Afrique. Mais souffrant de fortes migraines, il est envoyé aux Antilles (1865). C'est en Martinique qu'il se passionne pour la botanique en assurant le remplacement du professeur d'histoire naturelle au collège de Saint-Pierre. Ainsi, il commença à fréquenter le jardin botanique de Saint-Pierre, qui était alors dirigé par Charles Bélanger. A la mort de celui-ci, il fut pressenti pour le remplacer à la tête du jardin botanique. Malheureusement il ne fut pas nommé, mais il continua son travail de recensement de la flore aux Antilles.

En 1883, à l'exposition de Fort de France, il présente la collection la plus complète qui puisse exister de fougères du pays : 153 spécimens avec les graminées, les cypéracées, les commélynées et les lycopodiacées qu'il a recueillies.

En 1891, Antoine Duss est muté en Guadeloupe, affecté au collège de la Basse-Terre. Il continua son évaluation de la flore à la Soufrière notamment et dans les îles voisines. Il fut surnommé "le père aux herbes". En 1896, son ouvrage  Flore cryptogamique des Antilles françaises a un grand succès auprès des botanistes.

Une société botanique basée à Berlin sous la direction du docteur Hurban, l'aide à éditer en 1897: "Additamenta ad cognationem florae indiae occidentalis". Sa recherche le pousse à étudier l'utilité possible de certaines plantes pour la médecine et l'industrie. Il passe ensuite à des travaux sur les champignons, et fait publier une énumération méthodique des champignons recueillis à la Guadeloupe et à la Martinique, en 1903.
A la fermeture du collège de Basse-Terre en 1905, le père au herbes est nommé aumônier de l'hospice des pauvres à Tillac. En 1914, il crée un jardin botanique Le Castel sous l'égide de la Congrégation du Saint-Esprit. Il décède en 1924 (Guadeloupe), le jour où lui était décerné la croix de la légion d'honneur.


Retrouvez sur Manioc les ouvrages suivants : 


Bonne lecture !
C.P.


Lien vers l'article : http://blog.manioc.org/2017/11/focus-manioc-le-botaniste-antoine-duss.html

lundi 13 novembre 2017

Les missionnaires aux Antilles : Le révérend Père du Tertre

Le révérend Père du Tertre (1610-1687)


Source Gallica

Les sources narratives du début de la colonisation française sont limitées : le travail des "chroniqueurs" a longtemps représenté la première et principale source de travail des historiens. Manioc vous propose de redécouvrir certains d’entre eux. Notre deuxième focus se porte sur le révérend père Jean-Baptiste Du Tertre.


Né en 1610 à Calais, Jacques Du Tertre rejoint les ordres Dominicains à l'âge de 25 ans et y adopte le prénom de Jean-Baptiste après une vie déjà bien remplie : d’abord marin puis soldat avant de rejoindre les ordres et enfin botaniste, autant d’expériences utiles pour ses missions en tant que père. 
En 1640, il embarque pour la Guadeloupe pour succéder au père Raymond Breton. Arrivé sur l'île, il dut faire face aux nombreuses intrigues du gouverneur Houël, ainsi qu'aux maladies, à la famine qui sévissaient dans la colonie.
Après un court séjour en France, il repart vers la Guadeloupe pour fonder la paroisse de Capesterre où il résidera jusqu'en 1647.
Au milieu du XVIIe siècle, une autre aventure attendait Du tertre : la Grenade. En effet, en 1656, Du Tertre est contacté par M. de Cérillac pour aller négocier l'achat de l'île avec le gouverneur Du Parquet.
Malheureusement, Du Tertre est capturé par les Anglais au cours du voyage. Libéré, il finit par rejoindre la Martinique pour faire affaire avec Du Parquet (La Grenade sera bien vendue au comte Cérillac, qui ne paiera pas) et revient en France en 1657. Découragé par ses péripéties, Du Terte rentre en France définitivement où il meurt en 1687 à l'âge de 77 ans.


Sur Gallica :

Bonne lecture !
A.S. et C.P.



Lien vers l'article : http://blog.manioc.org/2017/11/les-missionnaires-aux-antilles-le.html

lundi 6 novembre 2017

A l'origine de Guantánamo...


A la faveur de l'attentat islamiste commis le 2 novembre sur le sol américain, voici que resurgissent, dans les tweets vengeurs de Donald Trump, le nom et la perspective de Guantánamo comme la destination punitive naturelle du  criminel appréhendé, étape ultime avant la peine de mort à laquelle le même Trump mais comment expliquer la séparation des pouvoirs en 140 signes ? n'a pas manqué de promettre à ce dernier.


Après le 11 Septembre, George Bush fit de cette enclave militaire américaine au Sud-Est de Cuba une prison hors la loi pour "combattants islamistes", c'est-à-dire un non-lieu juridique échappant au droit américain, placé hors de tout cadre légal et de toute procédure de jugement. A sa suite, empêché par une opposition hostile, et peut-être aussi par son manque de résolution sur ce dossier, Obama échoua à mener à bien son projet de fermeture du site et le maintint en activité, sans toutefois y expédier de nouveaux détenus.

Mais s'il évoque à nos mémoires saturées les épisodes les plus saillants et les plus saignants du chaos international en cours, le nom de Guantánamo renvoie avant tout à l'antagonisme plus que centenaire entre les États-Unis et Cuba, inscrit, à l'époque, dans une opposition commune et partagée à la présence espagnole.

Le portrait ci-contre est celui, peu connu, du "père" de GuantánamoTomàs Estrada Palma, noble figure de la guerre des Dix Ans premier acte de la révolution cubaine contre l'occupant espagnol, entre 1868 et 1878 , avant de s'illustrer comme l'hôte bienveillant d'un "grand frère américain" aux tendances interventionnistes naturelles et déjà soucieux de "liens spéciaux" avec son environnement immédiat.

En 1903, Tomàs Estrada Palma, en sa qualité de premier président de la République de Cuba, signa le Traité sur les relations entre les États-Unis d'Amérique et la République de Cuba. Plus qu'un traité, une liste de concessions et de renoncements ayant tous les dehors d'un chèque en blanc délivré aux USA. L'article VII dit ceci : "Pour établir les conditions qui permettront aux États-Unis de garantir l'indépendance de Cuba et de protéger son peuple, ainsi que pour sa propre défense, le Gouvernement de Cuba cédera ou louera aux États-Unis les terres nécessaires pour établir des bases navales ou charbonnières en certains points déterminés qui seront convenus avec le président des États-Unis." Si le nom de Guantánamo n''est pas cité explicitement, un accord ultérieur, en date 16/23 février 1903, le mentionne clairement. La prolongation des bases américaines sur l'île fut actée en 1934 par un second traité signé, côté américain, par l'ambassadeur Sterling (photo).
Mais, depuis 1959, pas plus facile pour l’État cubain de recouvrer cette partie perdue de son territoire que de tirer quelque profit pécuniaire de cette occupation : il se dit que Castro, en signe de protestation, refusa toujours d'encaisser les loyers afférents à cette location contrainte, comme l'explique cette source d'information. Cet autre site de presse revient sur le "trou noir juridique" que constitue Guantánamo, non pas tant du fait de l'existence du centre de détention mais en raison de l'occupation abusive, par les États-Unis, d'une portion de territoire étranger...


A lire :



P.OA

Lien vers l'article : http://blog.manioc.org/2017/11/a-lorigine-de-guantanamo.html

Le jardin botanique de Saint-Pierre

Sur les traces du jardin botanique de Martinique



Jardin botanique de Saint-Pierre 

Saviez-vous qu'il existait un jardin botanique en Martinique ? Au début du XIXe siècle, la ville de Saint-Pierre se voit attribuer la création d'un jardin des plantes. Manioc vous propose de le découvrir dans son article du blog d'aujourd'hui ...


Avant la fondation du jardin des plantes de Saint-Pierre, il existait trois jardins botaniques dans l'archipel des Antilles : celui de Saint-Vincent (1765), le petit Bath Garden en Jamaïque (1775) et le Royal Botanic Garden à Trinidad (1788).

C'est l'intendant François-Joseph de Foulquier qui proposa au roi, en 1786, la création d'un jardin botanique à Saint-Pierre. Mais le roi ne donna pas suite à sa demande. Foulquier était le fils d'un négociant. D'abord nommé intendant à Saint-Domingue, en Guadeloupe puis en Martinique en 1785. 

Le jardin fut créé le 30 pluviôse an XI (19 février 1803). Il semblerait que Joséphine de Beauharnais ne soit pas étrangère à cette décision. Rappelons que l'impératrice était née en Martinique et qu'elle se passionnait pour la botanique. De plus, la France souhaitait créer un jardin majestueux pour faire rayonner la botanique française dans la Caraïbe.
Inauguré en 1803, le jardin se situait entre la route du Morne Rouge et les falaises du Morne Parnasse, à 10 minutes de marche de la ville de Saint-Pierre. Ce terrain était une ancienne propriété des sœurs Ursulines.

 Le texte de sa création fixait en détails les objectifs suivants :
  • L'amélioration et l'accroissement de la culture de toutes les plantes utiles, natives, ou exotiques, épices, fruits... qui se trouvent dans la colonie
  • Introduire et acclimater les plantes étrangères ayant des relations avec la végétation locale
  • Enrichir l'agriculture locale
  • Faciliter l'étude de la botanique 
  • Instruire les habitants dans l'utilisation et l'application des méthodes de culture 
  • Produire et échanger des produits avec les pays étrangers 
  • Distribuer aux pauvres les plantes médicinales locales
  • Fournir au Jardin des Plantes de Paris et aux autres colonies françaises les plantes qui leur manquent et qu'ils souhaitent posséder.
Source Manioc
La fonction première du jardin des plantes était scientifique. Son rôle était de favoriser la naturalisation et la culture des arbres et des plantes utiles à la colonie, susceptibles de devenir une richesse pour celle-ci. Ainsi, une partie du jardin était réservée à l'école de botanique. Plusieurs pépinières furent créées dans le but de multiplier les plantes et d'améliorer certaines espèces (médicinales par exemple).

"Les plantes vivantes et les graines que nous avons apportées d'Europe, celles qui, grâce au concours du Gouvernement, nous sont parvenues du Sénégal, de l'Inde et de l'Algérie, les végétaux que nous avons reçus des jardins botaniques avec lesquels nous avons établi des relations d'échange, enfin nos excursions dans l'île nous ont permis d'enrichir la collection du jardin de Saint-Pierre de quatre cent cinquante espèces entièrement nouvelles". (Revue coloniale : extrait des Annales maritimes et coloniales, Paris, Imprimerie et librairie administratives de Paul Dupont, 1857, p. 218.)

Le jardin botanique de Saint-Pierre entretenait de nombreuses relations d'échanges avec les jardins botaniques de Saint-Vincent, de la Jamaïque, d'Algérie, du Sénégal, du Gabon et de France (Toulon, Montpellier, le Muséum de Paris). En 1856, le jardin botanique comptait pas moins de 1200 espèces de plantes !
"La collection botanique se trouve [...] composée aujourd'hui de mille deux cents espèces au lieu de sept cent cinquante qu'elle possédait au 1er janvier 1853". 
[...] Nous avons envoyé dix collections composées de sept cent cinquante paquets ou flacons de graines et appartenant à deux cent soixante espèces aux jardins botaniques de la Trinité et de la Jamaïque auxquels nous devons, surtout à ce dernier, des plantes fort rares; au jardin de naturalisation du Gabon, dont les envois en graines sont si remarquables par le soin apporté à leur préparation et à leur conservation à la pépinière centrale de l'Algérie, aux jardins botaniques de Rochefort, Toulon et Montpellier, soit directement, soit par des intermédiaires...". (Revue coloniale : extrait des Annales maritimes et coloniales, Paris, Imprimerie et librairie administratives de Paul Dupont, 1857, p. 223 et 226.)

Cascade au jardin botanique de Saint-Pierre
(source Gallica)
Plus d'une quinzaine de directeurs se sont succédé à la tête de l'institution. Le plus illustre fut le botaniste Charles Bélanger (1805-1881) qui a su redonner au jardin ses lettres de noblesse.

Le jardin sera détruit lors de l'éruption de la montagne Pelée le 8 mai 1902.  Malheureusement le jardin des plantes ne fut pas reconstruit, il devint une légende, seuls les écrits de voyageurs, de journalistes, de romanciers, de botanistes nous rappellent l’existence de ce patrimoine botanique magnifique comme en témoignent les écrivains Lafacdio Hearn, Philémon Césaire ou Louis Garaud.
"A la sortie de la ville sur la route du Morne-Rouge, on pouvait admirer immédiatement après les Trois-Ponts, le Jardin Botanique "célèbre dans toutes les Antilles par ses riches collections et les merveilles de sa végétation" (Philémon Césaire, La Montagne Pelée et l'effroyable destruction de Saint-Pierre (Martinique) le 8 mai 1902 : le brusque réveil du volcan en 1929 Paris, Impressions Printory et Georges Courville, 1930, p. 58.)
"Le jardin de Saint-Pierre est une des merveilles du monde, mais une merveille inconnue. On y jouit de tous les enchantements qu'offre une forêt vierge." (Louis Garaud, Trois ans à la Martinique, Paris, Alcide Picard et Kaan, 1895, p. 179.)

Les grands cycas
 du jardin botanique de Saint-Pierre
(Source Gallica)
Sur Manioc :

Sur Gallica : 



Bonne lecture !
C.P.



Lien vers l'article : http://blog.manioc.org/2017/11/le-jardin-botanique-de-saint-pierre.html